Le démantèlement de la « Jungle » de Calais a eu lieu à la fin du mois d'octobre, après dix-neuf mois d’existence de celle-ci. Des milliers de réfugiés ont été expulsés vers un des 287«centres d'accueil et d'orientation», dispersés sur tout le territoire français.

Entre 6000 et 8000 migrants, dont près de 1300 mineurs isolés, y vivaient alors, dans des conditions indignes, au cœur du plus grand bidonville de France. Ces femmes,hommes et mineurs viennent principalement du Soudan et d’Érythrée, d’Afghanistan, du Koweït et d’Irak; ils ont fui la guerre, les persécutions et la misère.

A la veille de l'expulsion de masse, 2000 réfugié-e-s, selon les associations, souhaitaient toujours se rendre en Angleterre.

L’État français présente cette destruction comme une vaste « opération humanitaire», de «mise à l’abri», tandis que les associations dénoncent une «opération électorale et de communication». Ce fut pour lui l'occasion de faire un show médiatique mondial.

Le 25 octobre, Médecins Sans Frontières a constaté que le tri entre mineurs et majeurs effectué par les services d’état au hangar d’enregistrement, était réalisé de manière expéditive exclusivement de visu. La protection individuelle qui devrait être accordée aux mineurs présents fut bafouée.

Le coordinateur de Médecins du monde expliqua, quant à lui, avoir perdu la trace « de malades et de personnes traumatisées bénéficiant de traitements psychiatriques qui étaient jusqu’à présent suivies dans le camp ».

La direction de l'état français assume depuis des années une politique qui stigmatise les étrangers, les musulmans-français et étrangers-, et les roms. Avec la loi Travail le gouvernement socialiste a déclaré une guerre de classe aux syndicats combatifs et à la CGT en premier lieu. Avec l'état d'urgence qui se prolonge sans fin, il réprime toujours plus syndicalistes irréductibles et activistes écologistes radicaux. Dans ce climat politique le président Hollande a perdu tout crédit à gauche, le PS est dans une crise grave évoquant ce qui advint du PASOK, la droite s'affirme néolibérale sans retenue et xénophobe sans complexe. Le parti post-fasciste FN apparaît alors comme dictant l'agenda politique de la majorité des politiciens de France.

C'est ce qui permet à ce parti, depuis plusieurs semaines, de développer une campagne xénophobe pour refuser l'accueil des réfugiés, organisant des rassemblements hostiles dans plusieurs villages français accueillant des étrangers. Plusieurs centres d'accueil d'étrangers ont été la cible de coups de feu ou d'incendies volontaires.

Mais le rôle essentiel de solidarité tenu par les ONG, MSF et MDM, et aussi les bénévoles solidaires venus de France, de Grande-Bretagne, de Belgique, etc. est une résistance en actes à cet air du temps. Une association comme "l’Auberge des migrants", des groupe d'activistes tels que les "No Borders" sont des expériences solidaires fantastiques. Il existe aussi un mouvement social en France qui a montré sa détermination inattendue lors des manifestations intersyndicales contre la loi Travail du printemps dernier, et lors de ce mouvement de places à la française que furent les « Nuit debout », place de la République à Paris et ailleurs. Ce mouvement est porteur d'avenir ainsi que le mouvement pour le droit d'asile et le droit au séjour qui se développe, mais il est trop minoritaire. Il s'appuie sur ces pratiques de solidarité inconditionnelle.

Laissons la parole pour conclure à certains de ces migrants, à Paris, fin octobre, et à leurs banderoles: « We escaped barbary », « We fight inhumanity », « We want freedom and equality ».

*psychiatre, syndicaliste, militant d'un collectif de soutien au peuple grec, militant de l'organisation politique Ensemble!

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